Ce matin, nous nous sommes réveillés sous la pluie, une pluie grassouillette, ronde et chaude car patinée par l’orage en approche, une pluie lisible à des kilomètres à la ronde, dressée en rideaux volatiles dont il était impossible de prédire la direction et qui propageait son pétrichor incomparable dans les brumes de notre réveil ; mais une pluie tout de même et pour tout dire, ça nous a momentanément mis un petit coup au carafon. Alors départ de Lastouilles, non sans descendre voir le lac pareillement nommé dont il serait très plaisant à l’occasion de goûter les eaux et d’en explorer les îles et leurs recoins en paddle. Quelques courses d’appoint à Mauriac puis une route de pampa vers Salers, départementale sinueuse et gondolée, glorieusement irrégulière et promenant ses rondeurs sur un plateau qui laissait parfois entrevoir les altitudes confortables du Puy violent.
Salers était pleine comme un œuf à notre arrivée ; le long de la route qui contourne la cité médiévale s’agglutinait une enfilade de grands-blancs indécents qui épuisaient le pourtour de verdure, anciennement enceinte de la cité. Il y avait aussi des véhicules plus modestes qui cherchaient un refuge entre deux monstres ; août déversait ses touristes et nous sommes passés devant des parkings aux prix scandaleux pour atteindre, quelques centaines de mètres plus haut, le municipal où Patrick, le gérant du camping -j’apprendrai son prénom très vite car nous conversâmes longuement de choses et d’autres- nous a accueilli avec une faconde réjouissante. Une fois posés, la suite n’est que repos à l’ombre en attendant d’aller plus tard dans la journée grossir le flot des aoûtiens dans la ville.
Sauf qu’il m’est impossible de rester sans rien faire dans un pareil décor. J’avais repéré une promenade sur la carte qui avait le bon goût de partir du camping, un chemin rose sur la carte IGN TOP25, une bouclette de quatre bornes qui léchait la falaise sur quelques mètres. Le reste de l’équipe soignant ses fatigues musculaires, je suis parti seul sur les chemins creux, sous la chaleur revenue, et du haut de la falaise la vue panoramique à 180° sur le Puy violent et ses environs m’a vu marquer un arrêt méditatif à la hauteur de la majesté du paysage.
En fin de journée, déambulations dans Salers et sa topographie médiévales, où d’une place de l’église partent des ruelles indisciplinées et une rue à peine plus étroite et pentue qui, passant sous un porche millénaire, nous hisse sur une nouvelle place dont on imagine sans mal les foires qui s’y tenaient -les exécutions peut-être-. Puis une nouvelle et courte descente nous conduit vers un parc offrant un panorama vertigineux sur un Cantal verdoyant dans lequel s’agite ici un tracteur minuscule parce que lointain et là des troupeaux tintinnabulant.
Il était l’heure de rejoindre le bouclard repéré à l’aller où nous attendait une table réservée avec la précaution née de notre expérience de ces lieux de vacances ; au menu : truffade, jambon, salade, frites maison et pichet de rouge sans prétention. Et dans ces moments de bouche, me reviennent comme une rengaine rigolote les mots de Jean-Pierre Marielle dans Calmos de Blier : ”Ahah… l’admirable cholestérol qu’on va se taper !…” Demain, si le temps le permet, on éliminera tout cela sur les pentes des volcans d’Auvergne.